Dans nos études des personnages qui sont mentionnés dans le Coran aussi bien que dans la Bible, nous avons considéré la vie de plusieurs hommes de Dieu. Aujourd’hui nous parlerons d’une femme. Le Coran parle de la femme de Noé, la femme de Lot, la reine de Saba, et d’autres femmes que l’on retrouve dans les pages de la Bible, mais à part Ève, la première femme, la seule dont le nom est cité dans les deux livres est Marie, la mère de Jésus. Son nom figure souvent dans le Coran, et il y a même une sourate qui est intitulée « Maryam », c’est-à-dire Marie. (À propos, il serait utile de signaler qu’en plus de plusieurs femmes dans le Nouveau Testament qui portaient ce même nom, Mariam, ou Marie, était aussi le nom de la sœur de Moïse, qui vécut 15 siècles avant le temps de Jésus.) Le terme que Mohamed employait le plus souvent pour parler de Jésus était « fils de Marie » ; le Coran affirme qu’elle était encore vierge quand elle a mis au monde le Messie, et il maudit ceux qui portèrent atteinte à la réputation de Marie par de fausses accusations d’impureté. Voyons maintenant ce que la Bible nous relate de cette femme exceptionnelle.
L’annonce faite à Marie
Nous commençons dans l’Évangile de Luc, chapitre 1 :
« Dieu envoya l’ange Gabriel dans une ville de Galilée nommé Nazareth, chez une jeune fille financée à un homme appelé Joseph, qui était un descendant du roi David ; le nom de la jeune fille était Marie. L’ange entra chez elle et lui dit : “Réjouis-toi, le Seigneur t’a accordé une grâce particulière, il est avec toi.” Marie fut troublée par ces mots ; elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation. L’ange lui dit alors : “N’aie pas peur, Marie, car tu as la faveur de Dieu. Tu vas devenir enceinte et tu mettras au monde un fils que tu nommeras Jésus. Il sera grand et on l’appellera le Fils du Dieu très haut. Le Seigneur Dieu fera de lui un roi, comme le fut David son ancêtre, et il régnera sur le peuple d’Israël pour toujours ; son règne n’aura point de fin.” Marie dit à l’ange : “Comment cela sera-t-il possible, puisque je suis vierge ?” L’ange lui répondit : “Le Saint-Esprit viendra sur toi et la puissance du Dieu très haut te couvrira comme d’une ombre. C’est pourquoi on appellera saint et Fils de Dieu l’enfant qui doit naître. Élisabeth ta parente attend elle-même un fils, bien qu’elle soit âgée ; on disait qu’elle ne pouvait pas avoir d’enfant et elle en est maintenant à son sixième mois. Car rien n’est impossible à Dieu.” Alors Marie dit : “Je suis la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait comme tu l’as dit.” Et l’ange la quitta. » (Luc 1.26-38)
Ce récit ressemble pas mal à ce qui est écrit dans le Coran à ce même sujet : Dans la troisième sourate nous lisons :
« (Rappelle-toi) quand les Anges dirent : “Ô Marie, certes Allah t’a élue au-dessus des femmes des mondes… Voilà qu’Allah t’annonce une parole de Sa part : son nom sera ‘al Masih’ (c’est-à-dire le Messie), ‘Issa’, fils de Marie, illustre ici-bas comme dans l’au-delà, et l’un des rapprochés d’Allah…” Elle dit : “Seigneur ! Comment aurais-je un enfant, alors qu’aucun homme ne m’a touché?” – “C’est ainsi !” dit-il. Allah crée ce qu’il veut. Quand il décide d’une chose, il lui dit seulement : “Sois” ; et elle est aussitôt. » (ayat 42-47)
Remarquez bien que ni la Bible ni le Coran ne mentionne des rapports sexuels entre Dieu et Marie. Loin de nous une telle pensée. Ce n’est pas du tout une idée enseignée par les chrétiens. Dieu n’a pas eu des rapports avec un être humain, à plus forte raison une femme qui était déjà fiancée, ou formellement promise, à quelqu’un. Oui, Jésus est né d’une manière miraculeuse – comme aucun autre enfant n’est jamais entré dans le monde. Marie était encore vierge quand son premier enfant est né. Elle n’avait eu des rapports sexuels avec personne, ni son fiancé, ni un autre homme, ni Dieu. Nous savons que les musulmans trouvent offensive et blasphématoire l’expression « Fils de Dieu », mais il faut qu’ils comprennent au moins que, dans la croyance chrétienne, cette expression ne suggère nullement l’idée que le Christ soit le produit d’une liaison sexuelle entre Dieu et une créature. Et Marie est bien une créature comme nous autres. La Bible ne lui attribue JAMAIS des titres telle que « mère de Dieu » ou « reine du ciel ». Quand l’ange Gabriel finit de lui livrer son message de la part de l’Éternel, Marie dit simplement et humblement : « Je suis la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait comme tu l’as dit » (Luc 1.38).
L’annonce faite à Joseph
Dans l’Évangile selon Matthieu nous apprenons que l’ange Gabriel s’est rendu plus tard auprès de Joseph, l’homme qui devait prendre Marie en mariage.
« Voici comment Jésus-Christ est né. Marie, sa mère, était fiancée à Joseph ; mais avant qu’ils aient vécu ensemble, elle se trouva enceinte par la puissance du Saint-Esprit. Joseph, son fiancé, était un homme pieux et ne voulait pas la dénoncer publiquement ; il décida de rompre secrètement ses fiançailles. Comme il y pensait, un ange du Seigneur lui apparut dans un rêve et lui dit : “Joseph, descendant de David, ne crains pas de prendre Marie comme épouse, car c’est par la puissance du Saint-Esprit qu’elle attend un enfant. Elle mettra au monde un fils, que tu appelleras Jésus, car il sauvera son peuple de ses péchés.”
Tout cela arriva afin que se réalise ce que le Seigneur avait dit par le prophète : “La vierge sera enceinte et mettra au monde un fils, qu’on appellera Emmanuel.” (Ce nom signifie “Dieu avec nous”.)
Quand Joseph se réveilla, il agit comme l’ange du Seigneur le lui avait ordonné et prit Marie comme épouse. Mais il n’eut pas de relation avec elle jusqu’à ce qu’elle ait mis au monde son fils, que Joseph appela Jésus. » (Matthieu 1.18-25)
D’autres événements dans la vie de Marie
Après la naissance de Jésus, nous avons quelques autres petits aperçus de Marie dans le Nouveau Testament. Il y a, bien sûr, les bergers, et plus tard les mages, qui sont venus pour honorer l’enfant Jésus. Il y a, au temple de Jérusalem, le vieux Siméon et la veuve Anne qui, par le Saint-Esprit, attirent tous deux l’attention des gens sur l’enfant Jésus, qu’ils identifient comme le Messie attendu par le peuple juif. Il y a le récit où, à l’âge de 12 ans, Jésus étonne les scribes et les docteurs de la loi juive par son intelligence et les réponses qu’il donnait à leurs questions. La Bible dit que Marie « gardait toutes ces choses dans son cœur » (Luc 2.51).
Des honneurs à Marie
La prochaine fois que nous voyons Marie, c’est au début du ministère public de Jésus. Il avait déjà quelques disciples qui le suivaient, mais il n’avait pas encore fait de miracles. Nous lisons en Jean 2 : « Il y eut des noces à Cana en Galilée. La mère de Jésus était là, et Jésus fut aussi invité aux noces avec ses disciples. Le vin ayant manqué, la mère de Jésus lui dit : Ils n’ont plus de vin. Jésus lui répondit : Femme, qu’y a-t-il entre moi et toi ? Mon heure n’est pas encore venue. Sa mère dit aux serviteurs : Faites ce qu’il vous dira. » Jésus est bien intervenu en faisant un miracle de compassion pour les jeunes mariés. Discrètement, il a transformé de l’eau en vin pour les invités afin que les hôtes ne soient pas honnis. . (Disons en passant que le mot grec qui est traduit par vin est plus général que le mot français, et ne précise pas s’il s’agit de jus non fermenté ou bien d’une boisson contenant de l’alcool. C’est une question à examiner un autre jour.)
Il est dommage que certains croyants citent cette histoire pour appuyer l’idée que l’on peut passer par Marie aujourd’hui pour obtenir des faveurs de la part de Jésus. Certains font remarquer que dans cette histoire, le couple qui se mariait avait un problème et que c’est Marie qui a porté le problème devant son Fils, qui n’a pas pu lui refuser ce qu’elle demandait. Ils estiment que même aujourd’hui, Marie nous servira de médiatrice. Si nous disons à Marie ce dont nous avons besoin, elle le dira à son Fils Jésus. Puisqu’elle est sa mère, il est sûr de lui accorder la faveur.
Mais ne soyons pas pressés pour tirer des conclusions. Étudions d’abord le passage. Une première chose qui nous frappe est la manière dont Jésus s’adresse à Marie. Au lieu de l’appeler « ma mère », il dit : « Femme, qu’y a-t-il entre moi et toi ? » En français ce serait certainement manquer de respect, surtout envers sa propre mère. En réalité, l’expression en grec n’était pas impolie, mais ce n’était quand même pas un terme employé habituellement en parlant à sa mère. Jésus l’utilisait souvent quand il parlait à d’autres femmes. Pour ne citer que deux exemples, il y a en Matthieu 15.28 la femme cananéenne qui demandait la guérison de sa fille, et en Jean 4.21 la femme samaritaine à qui Jésus a demandé de l’eau à boire. En s’adressant ainsi à sa propre mère Jésus indique peut-être qu’il voulait éliminer l’aspect de mère et fils dans ses relations avec Marie du moment où il entamait son travail de prophète. En appelant sa propre mère « Femme », Jésus ne la traitait pas avec mépris, mais il ne lui accordait pas plus d’honneur qu’à d’autres femmes. On a la nette impression qu’au lieu d’accentuer la relation mère et fils, Jésus la minimisait.
La même remarque peut se faire au sujet de deux autres passages. En Marc 3.31-35 nous lisons :
« Survinrent sa mère et ses frères, qui, se tenant dehors, l’envoyèrent appeler. La foule était assise autour de lui, et on lui dit : Voici, ta mère et tes frères sont dehors et te demandent. Et il répondit : qui est ma mère et qui sont mes frères ? Puis, jetant les regards sur ceux qui étaient assis tout autour de lui : Voici, dit-il, ma mère et mes frères. Car quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est mon frère, ma sœur, et ma mère. »
La relation que tout croyant peut avoir avec Jésus en vertu de notre obéissance à la Parole de Dieu est plus importante que la relation que la mère et les frères physiques de Jésus pouvaient réclamer en vertu de leur lien charnel avec lui. Ils n’avaient pas de privilèges particuliers ; ils n’avaient pas de priorité en ce qui concerne l’attention de Jésus.
Le seul passage dans la Bible où nous voyons Marie exaltée de quelque manière que ce soit est Luc 11.27-28. Notez bien la réaction de Jésus : « Tandis que Jésus parlait ainsi, une femme, élevant la voix du milieu de la foule, lui dit : Heureux le sein qui t’a porté ! Heureuses les mamelles qui t’ont allaité ! Et Il répondit : Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la gardent. »
Revenons à présent à l’histoire du miracle où Jésus a changé l’eau en vin. En lisant ce passage nous sommes aussi frappés par la phrase que Jésus adresse à Marie : « Qu’y a-t-il entre moi et toi ? Mon heure n’est pas venue. » En fait, la phrase « qu’y a-t-il entre moi et toi » servait généralement à repousser une intervention non-voulue. Nous voyons par la suite de l’histoire que Marie ne l’a pas interprétée comme un refus catégorique d’aider dans cette situation, mais on peut considérer que Jésus dit à Marie qu’elle n’a pas à lui dicter quand et comment il exercera son ministère ou emploiera son pouvoir miraculeux. Loin de justifier l’idée de certains qui pensent qu’en s’adressant à Marie on peut obtenir de Jésus ce que l’on veut, nous voyons que Jésus met une certaine distance entre lui et celle qui l’a mis au monde physiquement. Jésus est intervenu pour résoudre le problème comme Marie l’avait apparemment espéré, mais il semble qu’elle a aussi compris le doux reproche que Jésus lui avait adressé. En effet, elle n’a plus cherché à guider Jésus ou lui proposer des œuvres à accomplir jusqu’à la fin de son temps sur la terre. D’autres femmes seront avec lui et l’assisteront de leurs biens (Luc 8.2-3), mais nous ne verrons plus Marie, sauf au pied de la croix. Ayant dit que son heure n’était pas venue de manifester son identité, Jésus fait le miracle de telle manière que seuls les disciples et les serviteurs l’ont su.
Comme le dit le Coran, Dieu avait élue Marie au-dessus des autres femmes. Il lui a donné un honneur inimaginable – celui d’être la mère de Jésus. Mais n’exagérons pas. Ne lui donnons pas une gloire que la parole de Dieu ne lui accorde pas. Au lieu de fixer notre attention sur Marie, nous ferions mieux de suivre la parole que Marie à dite aux serviteurs ce jour-là à Cana au sujet de Jésus : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le. »