Le prochain personnage dans notre liste de prophètes reconnus dans le Coran aussi bien que dans la Bible est un homme très respecté non seulement par les chrétiens mais aussi par les musulmans, qui le connaissent sous le nom de Yahya, et par les Juifs, bien que son nom et son histoire ne paraissent même pas dans leurs Écritures. Les chrétiens l’appellent Jean-Baptiste. Selon le livre de Marc, le deuxième livre du Nouveau Testament, l’histoire de Jean-Baptiste représente « le commencement de l’Évangile, (ou l’Injil) de Jésus-Christ ».
Une raison possible pour la considération que chacune de ces religions lui accorde est peut-être la sainteté évidente de sa vie. Personne ne pouvait nier que Jean acceptait une vie dure au lieu de se laisser souiller par le monde. Il ne cherchait ni le confort ni la faveur des hommes puissants. Il s’habillait comme un pauvre, il s’abstenait totalement de vin et il se nourrissait de ce qui pouvait s’obtenir dans le désert. Selon Matthieu 3.4 : « Le vêtement de Jean était fait de poils de chameau et il portait une ceinture de cuir autour de la taille ; il mangeait des sauterelles et du miel sauvage. » Même quand il se mit à prêcher publiquement, Jean ne participait pas à la vie de la société juive, mais il se tenait dans les lieux non habités et la population se rendait auprès de lui pour l’écouter.
Sa mission
Mais quelle était la mission de Jean ? Nous avons déjà eu un aperçu de sa mission dans notre étude de Zacharie, son père. En effet, avant même sa naissance l’ange Gabriel avait annoncé au sujet de Jean : « Il s’avancera lui-même devant Dieu avec l’esprit et la puissance du prophète Élie, pour réconcilier les pères avec leurs enfants et ramener les désobéissants à la sagesse des hommes justes ; il formera un peuple prêt pour le Seigneur » (Luc 1.17). Sous l’inspiration de l’Esprit de Dieu, Zacharie déclara que son fils marcherait « devant le Seigneur pour préparer son chemin et pour faire savoir à son peuple qu’il le sauvera en pardonnant ses péchés. »
Quand il avait grandi il se mit à prêcher en disant : « Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche » (Matthieu 3.2). La repentance que Jean demandait était marquée par le baptême (v. 6). En se faisant baptiser, c’est-à-dire immerger dans l’eau, la personne avouait son besoin de se repentir, son intention de changer de comportement. L’acte même portait l’idée d’un bain de purification du péché. C’était pour la rémission, ou le pardon, des péchés. Jean donnait aux Juifs des avertissements comme celui-ci :
« “Ne vous mettez pas à dire en vous-mêmes ; ‘Abraham est notre ancêtre.’ Car je vous déclare que Dieu peut utiliser ces pierres pour en faire des descendants d’Abraham ! La hache est déjà prête à couper les arbres à la racine : tout arbre qui ne porte pas de bon fruit va être coupé et jeté au feu.”
Les foules lui demandèrent alors : “Que devons-nous donc faire ?” Il leur répondit : “Celui qui a deux chemises doit en donner une à celui qui n’en a pas, et celui qui a de la nourriture doit la partager.”
Des collecteurs d’impôts vinrent aussi pour être baptisés et demandèrent à Jean : “Maître, que devons-nous faire ? Il leur répondit : “Ne faites pas payer plus que ce qu’ordonne la loi.”
Des soldats lui demandèrent également : “Et nous, que devons-nous faire ?” Il leur dit : “Ne prenez d’argent à personne par la force ou en portant de fausses accusations, mais contentez-vous de votre solde.” » (Luc 3.8-14)
« Voici ce que Jean déclara lorsque les autorités juives de Jérusalem envoyèrent des prêtres et des lévites pour lui demander : “Qui es-tu ?” Il ne refusa pas de répondre, mais il affirma très clairement devant tous : “Je ne suis pas le Messie.” Ils lui demandèrent : “Qui es-tu donc ? Es-tu Élie ?” – “Non, répondit Jean, je ne le suis pas.” – “Es-tu le Prophète ?” dirent-ils. [Ils se référaient aux paroles de Moïse qui avait prédit la venue d’un prophète comme lui-même.] – “Non,” répondit-il. Ils lui dirent alors : “Qui es-tu donc ? Nous devons donner une réponse à ceux qui nous ont envoyés. Que dis-tu de toi-même ?” Jean répondit : “Je suis ‘La voix d’un homme qui crie dans le désert : Préparez un chemin bien droit pour le Seigneur !’” (C’est ce qu’a dit le prophète Ésaïe.)
Parmi les messagers envoyés à Jean, il y avait des Pharisiens, qui lui demandèrent : “Si tu n’es pas le Messie, ni Élie, ni le Prophète, pourquoi donc baptises-tu ?” Jean leur répondit : “Moi, je vous baptise avec de l’eau ; mais il y a au milieu de vous quelqu’un que vous ne connaissez pas. Il vient après moi, mais je ne suis pas même assez bon pour délier la courroie de ses sandales.” » (Jean 1.19-27)
La mission de Jean était donc tout simplement de préparer la venue de quelqu’un d’autre. En parlant d’arranger une route on ne parle pas, bien sûr, de mettre en bon état une route physique. Il s’agit de l’image d’un roi dont l’arrivée est préparée par le fait de nettoyer et réparer la route sur laquelle il doit voyager et par le fait d’envoyer un messager qui annonce sa venue. Il faut que l’arrivée du roi soit observée d’une manière digne de sa royauté. Dans ce cas précis, comme nous l’avons vu, il était question d’appeler le peuple à la repentance. Qui était donc le roi dont Jean prépare la venue de cette façon ? Si nous continuons la lecture du même texte, nous voyons la réponse :
« Le lendemain, Jean vit Jésus venir à lui, et il dit : “Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde. C’est de lui que j’ai parlé en disant : ‘Un homme vient après moi, mais il est plus grand que moi, car il existait déjà avant moi.’ Je ne savais pas qui ce devait être, mais je suis venu baptiser avec de l’eau afin de le faire connaître au peuple d’Israël.” » (Jean 1.29-31)
Jean connaissait probablement Jésus depuis sa jeunesse, car leurs mères étaient parentées. Mais ce fut apparemment le jour où Jésus est venu pour se faire baptiser que Dieu révéla à Jean que Jésus était celui dont il préparait la venue. L’Évangile de Matthieu nous dit :
« Alors Jésus vint de la Galilée au Jourdain ; il arriva auprès de Jean pour être baptisé par lui. Jean s’y opposait et lui disait : “C’est moi qui devrais être baptisé par toi et c’est toi qui viens à moi !” Mais Jésus lui répondit : “Accepte qu’il en soit ainsi pour le moment. Car c’est de cette façon que nous devons accomplir tout ce que Dieu demande.” Alors Jean accepta. Dès que Jésus fut baptisé, il sortit de l’eau. Au même moment les cieux s’ouvrirent pour lui ; il vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. Et une voix venant des cieux déclara : “Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; je mets en lui toute ma joie.” » (Matthieu 3.13-17)
Cette expérience confirma pour Jean ce qu’il avait compris à l’égard de Jésus. Il déclara :
« J’ai vu l’Esprit Saint descendre du ciel comme une colombe et demeurer sur lui. Je ne savais pas encore qui il était, mais Dieu, qui m’a envoyé baptiser avec de l’eau, m’a dit : “Tu verras l’Esprit descendre et demeurer sur un homme ; c’est lui qui va baptiser avec le Saint-Esprit.” J’ai vu cela, dit Jean, et j’affirme donc que cet homme est le Fils de Dieu. » (Jean 1.32-34)
Une des très grandes qualités de ce prophète était son humilité. Nous avons déjà vu qu’il se considérait tout simplement “une voix” qui annonce un message au sujet d’un autre. S’il parlait à son propre sujet c’était afin de magnifier l’importance de celui qui venait après lui. Il n’avait aucun désir d’une gloire personnelle et aucun sentiment de rivalité. Un jour quelques-uns de ses disciples lui dirent :
« “Rabbi, celui qui était avec toi au-delà du Jourdain, et à qui tu as rendu témoignage, voici, il baptise, et tous vont à lui.” Jean répondit : “…Vous-mêmes m’êtes témoins que j’ai dit : Je ne suis pas le Christ, mais j’ai été envoyé devant lui. Celui à qui appartient l’épouse, c’est l’époux ; mais l’ami de l’époux, qui se tient là et qui l’entend, éprouve une grande joie à cause de la voix de l’époux : aussi cette joie, qui est la mienne, est parfaite. Il faut qu’il croisse, et je diminue.” » (Jean 3.26-30)
Une autre grande qualité de Jean-Baptiste était son courage. En effet, le gouverneur Hérode Antipas, qui était le fils du méchant roi Hérode le Grand, séduisit Hérodias, l’épouse de son propre frère et, après avoir divorcé sans cause sa propre femme, il épousa Hérodias. Malgré le pouvoir et la méchanceté de ce gouverneur, Jean-Baptiste eut le courage de condamner ce comportement. Il dit clairement à Hérode : « Il ne t’est pas permis de l’avoir pour femme » (Matthieu 14.4). Même si la loi de Moïse permettait de divorcer sa femme, elle ne permettait pas de convoiter et séduire la femme de son prochain. Elle interdisait aussi, en Lévitique 18.16 et 20.21, d’avoir des rapports sexuels avec ou de prendre la femme de son frère. La manière dont Jean s’exprime est significative. Il ne dit pas : « Il ne t’était pas permis de prendre ou d’épouser la femme de ton frère. » Dans ce cas, Hérode aurait pu dire : je me repens – je ne prendrai plus désormais d’autres belles-sœurs comme femmes. Jean a plutôt dit : « Il ne t’est pas permis d’avoir la femme de ton frère. » Au vu de ce que Jean a dit, la repentance exigeait qu’il se sépare d’avec Hérodias. Quand on fait un mariage que la parole de Dieu défend, c’est la relation conjugale qui est pécheresse – ce n’est pas seulement la cérémonie ou l’action de contracter le mariage qui est une violation de la volonté de Dieu.
Parce qu’Hérode n’aimait pas le message, qui était de Dieu, il se fâcha contre le messager, qui n’était qu’un homme. Il fit arrêter Jean. Mais la conscience d’Hérode n’était pas morte. « Il craignait Jean, le connaissant pour un homme juste et saint ; il le protégeait … et l’écoutait avec plaisir » (Marc 6.20). (Malheureusement, son orgueil et sa considération de l’opinion des hommes l’influençaient plus que son sens du bien et du mal et sa crainte de Dieu. Hérodias, qui n’avait que de la haine pour Jean, le prophète qui voulait faire obstacle à son mariage, a su exploiter cette faiblesse en Hérode. Quand Hérode a fait devant ses invités un vœu de faire pour la fille d’Hérodias qui avait dansé devant lui ce qu’elle demanderait, Hérodias dit à sa fille de demander la tête de Jean-Baptiste. Hérode fut attristé, mais à cause de ses invités qui avaient entendu sa promesse, il n’a pas voulu refuser. Il envoya un garde qui fit décapiter Jean et apporta sa tête sur un plat.
Comme Jésus lui-même, Jean-Baptiste était encore relativement jeune quand il est mort. Mais la vie d’un homme n’est pas évaluée selon le nombre de jours qu’il passe sur la terre, mais plutôt selon la nature de ses actes et de son caractère. La mort tragique de Jean n’enlève rien à son honneur. Au contraire. Jésus lui-même dit à son sujet en Matthieu 10.11 : « Parmi ceux qui sont nés de femmes, il n’en a point paru de plus grand que Jean-Baptiste. »