Personnages du Coran et de la Bible

Jacob

Quand les hommes écrivent de l’histoire, ils montrent parfois du favoritisme pour leurs héros. Ils exagèrent les vertus ou ils font taire les fautes de leurs ancêtres, de leurs chefs d’autrefois ou de leurs prophètes. Dans la Bible on trouve que les récits des grands hommes, même les hommes de Dieu, nous révèlent non seulement les points forts mais aussi les erreurs et les faiblesses de ces hommes. Comme la parole de Dieu nous le dit à plusieurs reprises, « Dieu ne fait pas de favoritisme » ou « n’agit pas différemment selon les personnes » (Actes 10.34 ; Romains 2.11 ; Éphésiens 6.9 ; etc.). Cette objectivité de la Bible se voit très clairement dans l’histoire du personnage qui est l’objet de l’étude de ce jour, Jacob, le père du peuple d’Israël. Jacob, ou Yaqub, est mentionné plusieurs fois dans le Coran, mais la plupart des détails le concernant se rapportent à la vie de son fils, Joseph. Pour connaître l’histoire de la vie de Jacob avant que Joseph ne soit vendu en Égypte, il faut consulter la Bible. Mais comme nous venons de le suggérer, il n’y a aucun besoin de douter de la véracité de l’histoire simplement parce qu’elle a été écrite et conservées par des Juifs. Il est très évident que les Juifs n’ont pas modifié ou nettoyé l’histoire de Jacob pour protéger la réputation de leur ancêtre. Au contraire, le récit biblique nous présente un homme que Dieu a choisi et utilisé malgré des défauts sérieux.

L’histoire de Jacob se trouve principalement dans les chapitres 25 à 35 du livre de Genèse. Évidemment nous ne pouvons pas voir tous ces détails dans cette étude. Nous essayerons de toucher certains événements clé.

Naissance – achat du droit d’aînesse

Voici l’histoire de la naissance de Jacob :

« Isaac était le fils d’Abraham. À l’âge de quarante ans, il avait épousé Rebecca, sœur de Laban et fille de Bethuel, un Araméen de Haute-Mésopotamie. Mais Rebecca ne lui donnait pas d’enfant ; alors Isaac supplia le Seigneur en faveur de sa femme. Le Seigneur écouta sa prière, et Rebecca devint enceinte. Elle attendait des jumeaux. Or les enfants se donnaient des coups dans le ventre de leur mère. Elle s’écria : – S’il en ainsi, à quoi bon être enceinte ? Elle alla consulter le Seigneur. Le Seigneur lui dit : Il y a deux nations dans ton ventre ; deux peuples distincts naîtront de toi. L’un sera plus fort que l’autre, l’aîné servira le plus jeune.

Lorsque fut arrivé le moment de l’accouchement, il n’y eut plus de doute ; Rebecca avait des jumeaux. Le premier qui sortit était roux. Il était couvert de poils, comme d’un manteau ; on l’appela Ésaü. Après lui sortit son frère. Sa main tenait le talon d’Ésaü et on l’appela Jacob. Isaac avait soixante ans à leur naissance.

Les garçons grandirent. Ésaü devint un excellent chasseur qui aimait courir la campagne. Quant à Jacob, c’était un homme tranquille qui restait volontiers sous la tente. Isaac préférait Ésaü, car il appréciait le gibier, tandis que Rebecca préférait Jacob.

Un jour que Jacob préparait un potage, Ésaü revint de la chasse, très fatigué, et lui dit : Je n’en peux plus. Laisse-moi vite avaler de ce potage roux. (C’est pourquoi on l’a surnommé Édom, c’est-à-dire le Roux). Jacob répondit : Cède-moi d’abord tes droits de fils aîné. Ésaü déclara : – Je vais mourir de faim. A quoi me serviront mes droits de fils aîné ? Jacob reprit : Jure d’abord. Alors Ésaü jura qu’il lui cédait ses droits de fils aîné et Jacob lui donna du pain et du potage aux lentilles. Ésaü mangea et but, puis s’en alla. Il n’accorda aucune importance à ses droits de fils aîné. » (Genèse 25.19-34)

Chacun dans ce récit a, bien sûr, sa part de faute. Ésaü, que les musulmans connaissent sous le nom d’Al-Eis, a tort de mépriser l’héritage de ses pères Isaac et Abraham, car cet héritage est non seulement matériel, mais spirituel aussi. Dieu avait, en effet, promis de bénir le monde entier à travers la descendance de ces hommes, mais Ésaü n’a pas hésité de sacrifier pour un simple repas sa place privilégiée dans cette lignée familiale. C’est un échange insensé que de se vendre pour le plaisir d’un moment, un plaisir qui ne satisfait que pour peu de temps. La Bible cite plus tard Ésaü comme un exemple à ne pas suivre : « Que personne ne soit immoral ou dépourvu de respect à l’égard des choses sacrées, comme Ésaü qui, pour un seul repas, vendit son droit de fils aîné » (Hébreux 12.16). Mais Jacob, aussi, a mal agi. Trouvant Ésaü dans un moment de faiblesse, il a exploité la faim de son frère pour son propre gain. Il manqua d’amour fraternel et traita son frère d’une manière qu’il n’aurait pas voulu qu’on le traite. Mais les comportements indignes de ces frères ne se sont pas arrêtés là.

Tromperie de son père

L’histoire se poursuit en Genèse 27, où nous voyons qu’Isaac, devenu vieux et pratiquement aveugle, appela son fils Ésaü et lui dit d’aller à la chasse. Il lui dit : « Tu me ramèneras du gibier, tu me prépareras un de ces plats appétissants, comme je les aime, et tu me l’apporteras. J’en mangerai, puis je te donnerai ma bénédiction avant de mourir. Or Rebecca écoutait pendant qu’Isaac parlait à Ésaü » (Genèse 27.2-5). Rebecca appela Jacob et lui dit ce qu’elle avait entendu. Elle proposa de préparer un bon repas pour Isaac, de mettre sur Jacob un habit appartenant à Ésaü, de l’envoyer avec le repas auprès de leur père avant le retour d’Ésaü, et de faire croire à Isaac que c’était Ésaü qui revenait déjà pour recevoir la bénédiction. Jacob avait peur d’accepter la proposition de sa mère. Il dit : « Ésaü est couvert de poils, mais pas moi. Si mon père me touche, il découvrira que je le trompe et j’attirerai sur moi non pas sa bénédiction mais sa malédiction » (Genèse 27.11,12). Mais avec la peau des chevreaux dont elle a cuit la viande, Rebecca recouvrit les bras de Jacob ainsi que la partie lisse de son cou. Elle et son fils cadet réussirent leur coup, et Isaac prit Jacob pour son premier fils. Il n’est pas clair si Isaac savait qu’Ésaü avait vendu son droit d’aînesse à Jacob, mais il était sûrement au courant de la parole que l’Éternel avait donnée à Rebecca concernant les deux fils avant leur naissance. Malgré cela, Isaac favorise le fils qu’il préfère et cherche à contourner la prophétie par sa bénédiction paternelle. Selon la coutume de l’époque, cette bénédiction, validée par un repas cérémoniel, était le moyen par lequel un père accordait officiellement le droit d’aînesse à un fils. Isaac bénit la descendance de Jacob avec la rosée, l’abondance agricole, le dominion sur d’autres nations et sur ses frères (les Édomites, c’est-à-dire les descendants d’Ésaü). Pour Ésaü Isaac prédit un pays plus désertique, la violence et le conflit, et l’asservissement à Israël.

Fuite à Laban, vision de l’échelle

Les conséquences de cette tromperie délibérée étaient malheureuses. Quand Ésaü revint des champs et apprit ce qui était arrivé, son cœur déborda d’amertume et il se mit à pousser de grands cris.

« Ésaü en voulut à Jacob d’avoir reçu la bénédiction de leur père. Il se dit : “Mon père va bientôt mourir. Ce jour-là, je tuerai Jacob”. Quand Rebecca apprit les intentions de son fils, elle fit appeler Jacob et lui dit : – Attention, ton frère Ésaü veut se venger de toi en te tuant. Maintenant, écoute-moi bien, mon fils ! Pars d’ici, fuis chez mon frère Laban, à Haran. Tu resteras chez lui quelque temps, jusqu’à ce que ton frère se calme, que sa colère se détourne de toi et qu’il oublie ce que tu as fait. Alors je t’enverrai chercher là-bas. » (Genèse 27.41-45)

Jacob suivit ce conseil de sa mère et partit de Beer Schéba, là où la famille était établie, et arriva à un endroit qui serait appelé Béthel, à quelques kilomètres au nord de la future Jérusalem.

« Il s’installa pour la nuit, là où le coucher du soleil l’avait surpris. Il prit une pierre pour la mettre sous sa tête et se coucha à cet endroit. Il fit un rêve : une échelle était dressée sur la terre et son sommet atteignait le ciel. Des anges de Dieu y montaient et descendaient. Le Seigneur se tenait devant lui et lui disait : “Je suis le Seigneur, le Dieu de ton grand-père Abraham et le Dieu d’Isaac. La terre où tu es couché, je la donnerai à toi et à tes descendants. Tes descendants seront aussi nombreux que les grains de poussière du sol… À travers toi et tous tes descendants, je bénirai toutes les nations de la terre. Je suis avec toi, je te protégerai partout où tu iras et je te ramènerai dans ce pays.” » (Genèse 28.11-15)

Jacob fut très impressionné par ce rêve et par l’endroit où il se trouvait, endroit auquel il donna le nom de Béthel, ou « maison de Dieu ». Il y dressa un monument, et fit à Dieu un vœu de fidélité et promit de lui donner le dixième de tout ce que Dieu lui accorderait. La signification exacte de ce que Jacob avait vu n’est pas expliquée, mais il semble représenter l’intervention continuelle (ou la providence) de Dieu, au moyen de ses messagers les anges, dans ce qui se passe parmi les hommes sur la terre. Si Dieu dit à Jacob qu’il ne l’abandonnerait pas, c’est qu’il le suivrait de près et lui enverrait de l’aide quand il en aurait besoin. Jacob commence à comprendre que le Dieu de ses pères n’est pas limité à un seul endroit, mais qu’il est véritablement le Dieu de toute la terre.

Trompé par Laban dans mariage

Malgré l’aide de Dieu, Jacob a connu des épreuves là où il est parti. Il retrouva son oncle Laban et fut bien accueilli. Étant tombé amoureux de Rachel, la fille de Laban, Jacob proposa à son oncle qu’il travaillerait pour lui pendant sept ans en guise de dot afin de pouvoir épouser Rachel. Laban accepta cette proposition, et au bout des sept ans on fit le festin des noces ; mais le lendemain matin Jacob découvrit qu’il avait passé la nuit avec Léa, la première fille de Laban et non pas celle qu’il aimait et pour laquelle il avait servi. Laban défendit cette tromperie en disant simplement que ce n’était pas la coutume chez eux de donner la petite sœur en mariage avant la grande sœur. Jacob fut contraint de travailler encore sept années comme berger de Laban pour avoir Rachel. En tout il passa 20 ans chez Laban, et les rapports avec son beau-père n’étaient pas positifs. Quand il repartait chez lui, il dit à son oncle :

« J’ai passé vingt ans chez toi ; jamais tes brebis ou tes chèvres n’ont avorté, et jamais je n’ai mangé les béliers de ton troupeau. Jamais je ne t’ai rapporté une bête tuée par les animaux sauvages, j’en ai supporté moi-même la perte. Tu me réclamais les bêtes volées, qu’elles aient été dérobées le jour ou la nuit. Le jour je souffrais de la chaleur et la nuit du froid, au point de ne pouvoir trouver le sommeil. J’ai accepté de passer vingt ans chez toi : j’ai travaillé chez toi quatorze ans pour épouser tes deux filles et six ans pour acquérir du bétail, mais toi, tu as changé dix fois mon salaire. Si le Dieu de mon grand-père Abraham, le Dieu qui faisait trembler mon père Isaac, ne m’avait pas aidé, tu m’aurais laissé repartir les mains vides. » (Genèse 31.38-42)

Ajoutons que pendant le temps d’exil de Jacob, sa mère, Rebecca est morte.

Conclusion

Nous avons commencé en faisant la remarque que la Bible révèle les fautes aussi bien que les vertus des hommes dont elle parle. Revenons maintenant à cet épisode où Jacob vola la bénédiction paternelle ; il est important de ne pas en tirer une leçon que Dieu ne voudrait pas nous donner à travers cette histoire. Au lieu de considérer que Jacob a semé le mal (c’est-à-dire le mensonge), et qu’il en a récolté le bien (c’est-à-dire la bénédiction de son père), on devrait se rappeler les effets négatifs qu’il a subis : (1) Jacob et sa mère ne se sont plus jamais revus après la séparation qui s’est produite à cause de leur tromperie. (2) Jacob, qui a trompé son père, fut trompé à son tour par son beau-père, Laban. Pour ceux qui connaissent la suite de l’histoire, ils se rappelleront que Jacob fut trompé encore plus cruellement par ses propres fils qui vendirent leur petit frère Joseph comme esclave et firent croire à leur père que Joseph avait été déchiré par des bêtes sauvages. (3) Enfin, Jacob, qui en tant que fils d’un cheik extrêmement puissant, avait été un homme de richesse et d’influence, fut contraint à travailler très dur comme le serviteur d’autrui pendant vingt ans. Il a récolté beaucoup de malheur pour son péché.

Et pourquoi Rebecca et Jacob ont-ils commis ce péché ? Ils savaient que Dieu avait annoncé avant la naissance d’Ésaü et Jacob que la descendance du second fils serait bénie plus que celle du premier fils. Dieu avait un projet pour les enfants de Jacob, un peuple qu’il avait déjà choisi pour un but précis. Le problème était que Rebecca et Jacob croyaient devoir aider Dieu à réaliser sa propre promesse. En plus, ils estimaient que la fin justifie les moyens, et que tous les moyens étaient donc bons pourvu qu’ils obtiennent ce qu’ils cherchaient. Mais le Tout-puissant n’a pas besoin que nous commettions de l’injustice pour qu’il accomplisse ses desseins. Ayons toujours confiance en lui et restons dans la voie de la justice et de l’intégrité.

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