La Bible a-t-elle été changée ?

La Bible a-t-elle été corrompue ?

Beaucoup de musulmans ne considèrent pas la Bible parce qu’ils estiment qu’elle a été changée par les Juifs ou les chrétiens, qu’elle a été corrompue et qu’on ne peut plus y faire confiance. Certains disent que Dieu a bien donné le Tawrat (la Torah) de Moïse, mais la Torah fut corrompue. Alors il envoya le Zabour (les Psaumes) à David, mais le Zabour fut corrompu. Il envoya ensuite l’Injil (l’Évangile) à Jésus, fils de Marie, mais l’Injil fut corrompu. Enfin Allah fut obligé de donner le Coran à Mohamed. Ont-ils raison ? La vraie Bible a-t-elle été soit changée, soit enlevée carrément ?

« Nul ne peut changer les paroles d’Allah »

Un croyant a dit que lorsque quelqu’un prétend que la Bible a été corrompue, il répond, Astaghfir ‘Allah ! C’est-à-dire il demande tout de suite qu’Allah pardonne à cette personne d’avoir prononcé du blasphème. Il ne faut pas, en effet, qu’un serviteur d’Allah dise légèrement que de simples hommes mortels aient pu faire une telle chose. Après tout, nous savons tous que Dieu est le Tout-Puissant. N’est-il donc pas capable de protéger sa propre parole ? Bien sûr qu’il en est capable ! Si des êtres humains arrivent à corrompre la Parole de Dieu, c’est que ces êtres humains sont plus forts ou plus malins que Dieu, et nous savons que cela est impossible. Non, il est inconcevable que Dieu permette que sa Parole soit changée.

D’ailleurs, la Bible et le Coran tous deux nous affirment cela. Jésus dit en Marc 13.31 : « Les cieux et la terre passeront, mais mes Paroles ne passeront point. » Le prophète Ésaïe dit : « Toute chair est comme l’herbe, et tout son éclat comme la fleur des champs. L’herbe sèche, la fleur tombe, quand le vent de l’Éternel souffle dessus. Certainement le peuple est comme l’herbe : L’herbe sèche, la fleur tombe, mais la parole de notre Dieu subsiste éternellement » (Ésaïe 40.6-8). Le Coran affirme clairement la même chose. La Sourate 10 – Yunus, aya 64 dit : « Il n’y aura pas de changement aux paroles d’Allah – Voilà l’énorme succès ! » La Sourate 6 – Al-An’am, aya 34, dit pour sa part : « Et nul ne peut changer les paroles d’Allah. » D’autres passages du Coran soutiennent cette même vérité.

Le Coran ne dit pas d’ailleurs qu’il a été donné parce que les autres Écritures de la part d’Allah avaient été changées. Il suggère plutôt que sa révélation n’était pas encore parvenue au peuple arabe dans leur propre langue et que pour cette raison Allah choisit Mohamed et lui confia la même révélation pour son peuple, mais d’une manière qu’ils puissent la comprendre. Dans la Sourate 41 – Fussilat, ayat 43,44, Allah dit au prophète : « Il ne t’est dit que ce qui a été dit aux Messagers avant toi. Ton Seigneur est certes, Détenteur du pardon et Détenteur aussi d’une punition douloureuse. Si Nous en avions fait un Coran en une langue autre que l’arabe, ils auraient dit : “Pourquoi ces versets n’ont-ils pas été exposés clairement ? Un Coran nonarabe et un Messager arabe ?” » Ou encore, la Sourate 14 – Ibrahim, aya 4 : « Et Nous n’avons envoyé de Messager qu’avec la langue de son peuple, afin de les éclairer. » Encore, la Sourate 42 – As-Sura, aya 7 : « Et c’est ainsi que Nous t’avons révélé un Coran arabe, afin tu avertisses la Mère des cités (la Mecque) et ses alentours et que tu avertisses du jour du rassemblement, – sur lequel il n’y a pas de doute. »

On voit clairement que le don du Coran à Mohamed n’avait rien à voir avec une soi-disant corruption des révélations précédentes.

Deux sortes de corruption

Dans cette discussion on emploie parfois le mot arabe « Tahrif » qui veut dire que l’on dénature quelque chose, on le change de son état originel. On le traduit donc parfois par « corrompre ». Mais on ignore souvent qu’il y a deux sortes de « tahrif » : il y a tahrif-i lafzi qui désigne le fait de changer le texte écrit, le texte même ; il y aussi tahrif-i ma’nawi, qui désigne le fait de changer le sens, c’est-à-dire de donner de mauvaises explications d’un texte.

En lisant les passages du Coran que certains citent pour appuyer l’idée que la Bible a été corrompue, il est clair que presque tous ces textes se réfèrent à la deuxième sorte de Tahrif, et ne mettent donc nullement en doute l’authenticité du texte de la Bible telle que nous l’avons. Par exemple, dans la Sourate 3 – Al-Imran, aya 78, nous lisons : « Et il y a parmi eux certains qui roulent leurs langues en lisant le Livre pour vous faire croire que cela provient du Livre, alors qu’il n’est point du Livre ; et ils disent : ‘Ceci vient d’Allah, alors qu’il ne vient point d’Allah. Ils disent sciemment des mensonges contre Allah. » Iman Fakhar al-Din Razi dans son commentaire sur ce verset dit explicitement que les Juifs commirent « Tahrif-I-Manwai » seulement et que ce passage ne signifie pas qu’ils aient altéré le texte sacré.

On cite également la Sourate 2 – Al-Baqarah, ayat 75,77 :

« Et bien, espérez-vous [Musulmans] que des pareils gens [les Juifs] vous partageront la foi ? alors qu’un groupe d’entre eux, après avoir entendu et compris la parole d’Allah [la Torah], la falsifièrent sciemment… Ne savent-ils pas qu’en vérité Allah sait ce qu’ils cachent et ce qu’ils divulguent ? Et il y a parmi eux des illettrés qui ne savent rien du Livre. »

Remarquez que ces passages se réfèrent uniquement aux Écritures juives et non pas à l’Évangile. En plus, ils ne parlent pas de changer ce qui était écrit, mais plutôt de tordre le sens quand on faisait la lecture à haute voix de ce qui était écrit, ou de changer le sens qu’on donnait aux auditeurs par le fait d’omettre certaines parties et ne pas les prononcer.

Un complot mondial ? Vraiment ?

Il y a, par contre, un texte dans le Coran qui parle d’un péché commis par certains Juifs en écrivant. « Malheur, donc à ceux qui de leurs propres mains composent un livre puis le présentent comme venant d’Allah pour en tirer un vil profit ! Malheur à eux, donc, à cause de ce qu’ils en profitent ! » (Sourate 2 – Al-Baqarah, aya 79). Mais ces accusations signifient-elles que les Juifs prenaient un texte authentique et l’altéraient de façon permanente ? Supposons qu’une corruption de manuscrits ait eu lieu : Ne peut-on pas demander si tous les Juifs du monde ont suivi ceux à qui Mohamed s’adresse ici ? Et si, bizarrement, les Juifs dans tous les autres pays ont accepté les changements apportés par le groupe mentionné dans ce passage du Coran, faut-il croire que tous les chrétiens à travers le monde aient accepté ces mêmes changements à leurs textes sacrés ? Car il faut se rappeler que les chrétiens, aussi, possèdent la Torah. Eux, aussi, ont chéri et conservé les livres de Moïse et des autres prophètes depuis presque deux mille ans. On ne peut guère déduire de ce texte qui se réfère à un acte commis au sein d’une petite communauté juive dans un endroit reculé ait eu pour résultat la corruption de la Torah dont toute la population juive partout dans le monde à l’époque, ainsi que la population chrétienne, plusieurs fois plus grande, possédaient des exemplaires. Ce n’est pas une déduction raisonnable. En plus, comme nous l’avons dit, aucun de ces passages coraniques ne parle d’une corruption de l’Injil, le Nouveau Testament des chrétiens.

Il est important de savoir qu’avant le douzième siècle, c’est-à-dire cinq cents ans après le temps de Mohamed, aucun érudit musulman n’a suggéré que les textes de la Bible aient été corrompue. Ni Mohamed, ni ceux qu’on appelle « les bien dirigés » n’ont avancé une telle idée. Les anciens commentateurs, tels que Ibn Mazar et Abou Hatim, citaient Ibn Muniyah pour affirmer explicitement que la Torah et l’Injil sont encore dans le même état de pureté dans lequel ils furent descendus du ciel, et qu’aucune modification n’a été faite, mais que les Juifs avaient l’habitude de tromper le peuple par des arguments mal fondés et en tordant le sens de l’Écriture.

Un livre corrompu peut-il confirmer une révélation de Dieu ?

La Sourate 2 – Al-Baqarah, ayat 40,41 dit : « Ô enfants d’Israël, rappelez-vous Mon bienfait dont je vous ai comblé… Et croyez à ce que J’ai fait descendre, en confirmation de ce qui était déjà avec vous ; et ne soyez pas les premiers à le rejeter. »

La Sourate 5 – Al-Ma’idah, ayat 68,69 dit :

« Ô gens du Livre, vous ne tenez sur rien, tant que vous ne vous conformez pas à la Torah et à l’Évangile et à ce qui vous a été descendu de la part de votre Seigneur… Ceux qui ont cru, ceux qui se sont judaïsés, les Sabéens, et les Chrétiens, ceux parmi eux qui croient en Allah… et au Jour dernier, et qui accomplissent les œuvres bonnes, pas de crainte sur eux et ils ne seront point affligés. »

Le lecteur ne peut que tirer la conclusion que, selon le Coran, les révélations accordées au peuple du Livre étaient encore à leur disposition. Il n’y a aucune indication que ces Écritures avaient été enlevées ou annulées par Dieu ou corrompues par les hommes. Au contraire, l’existence des Écritures est affirmée explicitement.

Le deuxième passage avertit le peuple du Livre que s’ils n’observent pas la Torah et l’Injil, ils sont des mécréants (kafirun). Si les textes authentiques n’étaient pas disponibles, pourquoi le Coran dirait-il au peuple du Livre de les observer et d’y obéir ?

Nous avons déjà cité la Sourate 4, aya 136 : « Ô les croyants ! Soyez fermes en votre foi en Allah, en Son messager, au Livre qu’Il a fait descendre sur Son messager, et au Livre qu’il a fait descendre avant. Quiconque ne croit pas en Allah, en Ses anges, en Ses Livres, en Ses messagers et au Jour dernier, s’égare, loin dans l’égarement. » Étant donné que le Coran ordonne aux fidèles de croire à tous les livres (c’est-à-dire à apprendre, à comprendre et à suivre leur contenu), c’est que leur contenu ne peut pas être corrompu ou annulé.

Enfin, même Mohamed, en cas de doute, devait se référer aux Écritures confiées aux Juifs et aux Chrétiens. Allah lui dit dans la Sourate 10 – Yunus, aya 94 : « Et si tu es en doute sur ce que Nous avons fait descendre vers toi, interroge alors ceux qui lisent le Livre révélé avant toi. La vérité certes t’est venue de ton Seigneur : ne sois donc point de ceux qui doutent. » Ne vous semble-t-il pas étrange que certains musulmans prétendent que la Bible a été annulée, enlevée au ciel, ou corrompue de sorte qu’elle ne soit plus une guide fiable ? Évidemment, on ne pourrait pas se servir d’un livre corrompu pour évaluer ou confirmer le Coran.

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