Dieu pourrait-il avoir un Fils ?

Le danger de vouloir limiter Dieu

L’Islam se donne la noble ambition de toujours défendre l’honneur de Dieu. Peut-on trouver une plus grande proclamation de la grandeur de Dieu que celle que nous trouvons dans la Sourate 2 du Coran – Al-Baqarah, aya 255 :

« Allah ! Point de divinité à part lui, le Vivant, Celui qui subsiste par Lui-même. Ni somnolence ni sommeil ne Le saisissent. À lui appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Qui peut intercéder auprès de lui sans Sa permission ? Il connaît leur passé et leur futur. Et, de Sa science, (eux) ils n’embrassent que ce qu’Il veut. Son Trône déborde les cieux et la terre, dont la garde ne Lui coûte aucune peine. Et il est le Très Haut, le Très Grand. »

Nous, les chrétiens, nous sommes tout à fait d’accord avec cette conception élevée du Dieu tout-puissant. Il est infiniment plus grand que tout ce que nous pouvons concevoir.

Malheureusement, en voulant défendre l’honneur et proclamer la gloire et la majesté de Dieu, il arrive aux hommes de limiter Dieu en quelque sorte. D’un côté on rejette ce que Dieu lui-même a révélé à son propre sujet. De l’autre côté, on dit présomptueusement des choses au sujet de Dieu que nous ne pouvons pas savoir. Lui seul peut nous faire savoir sa vraie nature.

« Dieu ne pourrait pas devenir un homme »

Nous savons tous que Dieu est puissant, majestueux et glorieux, au-delà de ce que nous pouvons imaginer. Il est totalement saint, juste et pur. Son autorité royale est absolue, et sa connaissance est parfaite. Quand on essaie de tenir compte de toute sa grandeur, on peut trouver qu’il serait déraisonnable, impensable qu’il se dépouille et s’humilie afin de prendre la forme d’un homme mortel et méprisable, afin de vivre parmi des pécheurs, afin même de souffrir pour eux. Il ne convient pas à l’Être suprême de mettre de côté sa dignité, et de s’humilier ainsi. Mais ce n’est pas tout. Selon ce que disent les chrétiens, Dieu aurait permis à des hommes méchants de le maltraiter, injustement, bien sûr. Ils l’auraient torturé et finalement tué. On se dit que ce n’est tout simplement pas possible.

Mais nous croyons que puisque Dieu est totalement libre, souverain et tout-puissant, il peut faire tout ce qu’il veut faire. La seule chose qui soit impossible à Dieu serait de pécher. La Bible dit, par exemple, qu’il est impossible que Dieu mente (Tite 1.2 ; Hébreux 6.18). Il serait contraire à la nature du Dieu de vérité de pratiquer le mensonge. C’est le diable qui est « le père du mensonge » (Jean 8.44). Dieu reste fidèle à son propre caractère saint, juste et fidèle. « Si nous le renions, lui aussi nous reniera ; si nous sommes infidèles, il demeure fidèle, car il ne peut se renier lui-même » (2 Timothée 2.12,13). Que Dieu soit loué, car il ne pèche pas ; et il ne peut pas pécher, car il n’est pas dans sa nature de vouloir pécher.

Mais ce n’est pas un péché que d’être un homme. Pourquoi dire, alors, que Dieu ne pourrait pas devenir un homme, s’il choisissait faire ainsi ? Si Dieu le Fils devenait un être humain, il aurait à accepter les limites de l’existence dans un corps humain, mais il ne cesserait pas d’être Dieu. Selon la Sourate 27 – An-Naml, aya 8, lorsque Moïse s’approcha du buisson ardent dans le désert du Sinaï, « on l’appela, – béni soit Celui qui est dans le feu et Celui qui est tout autour, et gloire à Allah, Seigneur de l’univers ». Si Allah a daigné se manifester dans un feu, ne peut-il pas se manifester dans la forme d’un homme ; un être humain est quand même plus grand qu’un feu. Remarquez que le Coran précise, avec raison, que même si Allah était dans le feu du buisson ardent, il continuait d’être tout autour et le Seigneur de l’univers. Pareillement, si Dieu était dans le corps de Jésus, il était en même temps partout ailleurs et demeurait le Maître de l’univers. Même quand le corps de Jésus était dans la tombe, Dieu régnait encore et remplissait l’univers.

Ce qu’il faut comprendre, c’est que Dieu peut faire ce qu’il veut faire. La question n’est donc pas « Comment Dieu pourrait-il devenir un être humain ? », mais

« Pourquoi Dieu accepterait-il de devenir un être humain ? »

Bien plus, pourquoi Dieu accepterait-il de souffrir injustement et d’être mis à mort pour sauver l’humanité. On peut répondre par un seul mot : l’amour.

« Dieu prouve son amour envers nous, en ce que, lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous. » (Romains 5.8)

« Pour nous, nous l’aimons, parce qu’il nous a aimés le premier. » (1 Jean 4.19)

Si nous ne comprenons pas l’amour de Dieu, c’est peut-être parce que notre grand orgueil nous empêche de saisir l’amour divin qui, selon 1 Corinthiens 13.4,5, « est patient, plein de bonté, ne se vante point, ne s’enfle point d’orgueil… ne cherche point son intérêt ».

La nuit où Jésus fut arrêté, il était seul avec ses douze apôtres. Depuis trois ans il avait enseigné ses disciples et leur avait montré comment il faut renoncer à ses propres intérêts pour servir les autres. Mais voilà que, selon Luc 22.24-26, ses disciples n’avaient pas encore appris la leçon. Ce passage nous dit :

« Il s’éleva aussi parmi les apôtres une contestation : lequel d’entre eux devait être estimé le plus grand ? Jésus leur dit : Les rois des nations les maîtrisent, et ceux qui les dominent sont appelés bienfaiteurs. Qu’il n’en soit pas de même pour vous. Mais que le plus grand parmi vous soit comme le plus petit, et celui qui gouverne comme celui qui sert. »

Puis Jésus a posé un acte par lequel il a une fois de plus enseigné à ses disciples cette leçon importante. En Jean 13.1-5 nous lisons :

« Avant la fête de Pâque, Jésus, sachant que son heure était venue de passer de ce monde au Père, et ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, mit le comble à son amour pour eux. Pendant le souper… Jésus, qui savait que le Père avait remis toutes choses entre ses mains, qu’il était venu de Dieu, et qu’il s’en allait à Dieu, se leva de table, ôta ses vêtements, et prit un linge, dont il se ceignit. Ensuite il versa de l’eau dans un bassin, et il se mit à laver les pieds des disciples, et à les essuyer avec le linge dont il était ceint. »

Laver les pieds des autres était une marque d’hospitalité et d’amour, mais c’était une tâche très humble, accomplie généralement par la personne la moins importante, celle dont le rang était le plus bas. Parmi les disciples de Jésus qui étaient présents cette nuit-là, aucun n’avait pensé rendre cet humble service à ses camarades. Mais Jésus lui-même, le Maître, s’est abaissé afin de le faire pour ses élèves. La lecture en Jean 13 se poursuit ainsi :

« Il vint donc à Simon Pierre ; et Pierre lui dit : Toi, Seigneur, tu me laves les pieds ! Jésus lui répondit : Si je ne te lave, tu n’auras point de part avec moi. Simon Pierre lui dit : Seigneur, non seulement les pieds, mais encore les mains et la tête. Jésus lui dit : Celui qui est lavé n’a besoin que de laver ses pieds pour être entièrement pur ; et vous êtes purs, mais non pas tous. Car il connaissait celui qui le livrait ; c’est pourquoi il dit : Vous n’êtes pas tous purs. »

Nous pouvons bien comprendre la réaction de Pierre. Il ne semblait pas normal pour le Seigneur de faire pour ses disciples ce qui était la tâche d’un esclave. Jean-Baptiste avait dit qu’il n’était pas digne même d’être l’esclave de Jésus, pas digne de délier la courroie de ses sandales pour laver ses pieds. S’il n’était pas digne de servir Jésus, à plus forte raison il n’était pas digne de se faire servir par Jésus. C’est le sentiment de Pierre, aussi. Pour lui, comme pour les hommes de nos jours, un grand personnage, un homme très important ne devait pas avoir à faire des tâches humbles. Ce sont les autres qui devraient servir une telle personne. Cela fait partie des droits liés à sa position. Combien plus ce serait vrai si on parlait de Dieu.

Les premiers versets du chapitre nous ont rappelé que Jésus était bien conscient de sa position en tant que Fils de Dieu. Il savait qu’il devait être bientôt glorifié, qu’il était venu de Dieu le Père et qu’il retournait vers Dieu le Père qui avait tout remis entre ses mains. Mais il ne s’accrochait pas à ses droits. Comme Philippiens 2.7,8 nous dit : « Il s’est dépouillé lui-même, en prenant une forme de serviteur, en devenant semblable aux hommes ; et ayant paru comme un simple homme, il s’est humilié lui-même, se rendant obéissant jusqu’à la mort, même la mort de la croix. » Pour Jésus, il n’y avait pas de conflit entre la grandeur et le service aux autres. Il dit en Marc 10.45 : « Le Fils de l’homme est venu, non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie comme la rançon de plusieurs. »

Quand Pierre a voulu refuser d’avoir les pieds lavés par Jésus, le Seigneur lui a dit : « Si je ne te lave, tu n’auras point de part avec moi. » Ensuite il a parlé d’être, non pas propre, mais entièrement pur. En effet, ce ne sont pas les pieds de Pierre qu’il a en vue, mais son âme. Jésus lave ses disciples et les rend purs par son sang, par sa mort sur la croix. Laver les pieds de ses disciples pouvait sembler un service trop humiliant pour être accepté, mais être arrêté, insulté, battu et cloué sur une croix serait cent fois plus humiliant. Pourtant Jésus était prêt à subir tout cela, et celui qui ne peut pas accepter que Jésus souffre ainsi pour lui ne pourra jamais être purifié de ses péchés. Il n’y a pas d’autre solution. Si Pierre ne peut pas accepter que Jésus lui lave les pieds, comment acceptera-t-il que Jésus meure pour lui ? Il faut nous laisser servir, il faut nous laisser sauver par Jésus, qui est Dieu le Fils.

Un enseignement fondamental du christianisme, c’est que la plus grande action qu’une personne peut faire, c’est de servir, au point même de mourir pour les autres. Ce désintéressement, cette humilité, cet amour plein d’abnégation est au cœur de Dieu. Dieu est tellement grand qu’il s’est humilié pour se rendre serviteur. Le Créateur de l’univers a montré sa grandeur dans l’humilité, le service et l’amour.

Conclusion

Nous l’avons déjà dit : en voulant défendre l’honneur et proclamer la gloire et la majesté de Dieu, il arrive aux hommes de limiter Dieu en quelque sorte. Lui seul peut nous faire savoir sa vraie nature.

C’est à lui de nous dire si son unité est simple ou complexe. Nous ne devons pas nous étonner de ce que le Dieu infini soit plus complexe que nous, plus difficile à saisir. Ayons donc de l’humilité quand nous parlons de lui.

Nous devons aussi faire très attention avant de proclamer ce que Dieu ne peut pas être ou ne peut pas faire. Sommes-nous, avec notre intelligence et connaissance limitées, capables d’être les juges de ce que le Tout-Puissant peut faire ? Qui sommes-nous pour dire que Dieu ne peut pas, s’il le veut, prendre la forme d’un homme ? Est-ce qu’on ne pourrait pas se rendre ainsi coupable d’un blasphème ? Dieu est libre de se révéler tel qu’il est, au-delà de ce que l’homme comprend ou s’imagine. Comme dit le Coran : Allah « connaît leur passé et leur futur. Et, de Sa science, (eux) ils n’embrassent que ce qu’Il veut ».

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Un Dieu complexe